Les SCPI sans frais de souscription sont-elles plus intéressantes que les SCPI “traditionnelles” ?
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Les frais SCPI : à quoi servent-ils ?SCPI sans frais d’entrée : vraie ou fausse bonne idée ?Équilibre des marchésEn résuméDepuis qu’elles existent, les Sociétés Civiles de Placement Immobilier appliquent des frais de souscription sur le prix de revente des parts. Pour mieux séduire, voilà quelques années que des SCPI affichant des commissions d’entrée inexistantes apparaissent sur le marché.
Les frais SCPI : à quoi servent-ils ?
Frais de souscription : financer le développement du parc immobilier
Investir dans une SCPI implique le règlement de frais variés, dont une commission de souscription. Établie par la société de gestion, cette commission est comprise dans le prix de la part. Non négociable, elle représente environ 9% à 12% du montant souscrit.
La commission de souscription sert, entre autres, à rétribuer la société de gestion pour mener la collecte auprès des épargnants, assurer la recherche et l’achat de biens immobiliers, ou encore payer les partenaires CIF.
Les frais de souscription comportent une particularité : ils sont pris à l'entrée mais impactent le souscripteur uniquement à la sortie, puisque ce dernier vendra ses parts à la valeur de retrait et non au prix de souscription. En complément, le taux de distribution de la SCPI se calcule sur le prix de la part, frais compris : pour une SCPI avec 10% de commission de souscription, 200€ placés à 5% donneront bien 10€ de dividendes, même si seulement 180€ (200 - 10% = 180) auront été vraiment investis.
L’intégralité de votre épargne travaille pendant le temps où vous détenez vos parts. C’est pourquoi les conseillers en gestion de patrimoine recommandent aux associés de conserver leurs parts SCPI au moins 8 ans. Cette durée devrait vous permettre d’amortir les frais de souscription grâce à la revalorisation des parts. Une revalorisation elle-même liée à la revalorisation du parc immobilier de la SCPI.
Frais de gestion : financer la gestion des biens
Aux frais de souscription s’ajoutent ensuite les frais de gestion annuels. Prélevés directement sur les loyers encaissés, les frais de gestion sont connus dès la souscription. Le taux indiqué montre combien la société prend sur chacun des loyers. Par exemple, pour des frais de gestion à 12%, vous percevrez votre part du loyer - 12%. Ces frais peuvent se comparer à la commission perçue par une agence immobilière afin de gérer un bien physique et les charges afférentes (taxe foncière, charges de copropriété, etc).
Les SCPI collectent l’argent des investisseurs pour acquérir des actifs immobiliers et étendre leur parc. Ces actifs génèrent des revenus locatifs, reversés comme dividendes aux associés (au prorata du nombre de parts détenues). La société retranche les frais de gestion sur ces revenus encaissés.
Ces frais portent bien leur nom, ils servent à assumer les dépenses administratives (frais de bureaux, de personnel, etc) et les coûts d’exploitation (frais non pris en charge par les locataires).
Autres frais : gérer les dépenses courantes
Frais d’acquisition
Une société de gestion a toute la liberté d’acquérir ou de vendre un bien appartenant à son parc immobilier. Pour financer ces transactions, à l’achat comme à la revente, la SCPI applique des frais d’acquisition. De même que les frais de gestion, ces frais d’acquisition sont retranchés directement des loyers perçus.
Frais de travaux
La SCPI demande également des frais de travaux qui servent à entretenir ses biens immobiliers. Directement prélevée sur les loyers perçus, cette commission équivaut à un pourcentage du montant total des travaux réalisés.
Frais de cession
Les frais de cession s’appliquent uniquement lors d’une revente des parts SCPI. Il s’agit d’une commission encaissée par la SCPI pour la revente d’un bien de son parc immobilier.
Par exemple, si la SCPI revend un immeuble A à un tiers B, elle doit verser des frais spécifiques – pour l’administratif, etc - aux brokers.
Ces frais sont également déduits directement des loyers, ce qui impacte le rendement.
SCPI sans frais d’entrée : vraie ou fausse bonne idée ?
Un investissement réalisable à court terme
Étant un placement à long terme, l’investissement en SCPI nécessite de conserver ses parts 8 à 15 ans minimum… le temps que celles-ci soient revalorisées. La revalorisation des parts amortit ainsi les coûts liés aux frais de souscription.
En supprimant cette commission d’entrée - qu’il n’y a plus besoin d’amortir - les SCPI sans frais de souscription permettent aux épargnants d’investir à court terme. De facto, le prix de revente des parts devient égal au prix de souscription. Concrètement, si vous investissez 600€ en achetant des parts de SCPI, vous pourrez revendre ces parts au même prix, hors dévaluation ou revalorisation probable de la part. Par contre, pour une SCPI avec frais d’entrée, la commission de souscription est prélevée sur le prix de part à la revente. Si vous placez 400€ dans les parts d’une SCPI à 10% de frais de souscription, vous revendrez vos parts à 360€. Conserver vos parts sur une longue durée vous permet ici d’obtenir un rendement intéressant, tout en comblant ce “déficit”.
Des frais finalement très similaires des SCPI « classiques »
Confrontées aux mêmes problématiques que les SCPI « traditionnelles », les sociétés de gestion qui commercialisent des SCPI sans frais de souscription ont, elles aussi, besoin de se rémunérer. Pour compenser l’absence de commission d’entrée, les SCPI sans frais reportent ailleurs la ristourne qu’elles accordent à l’inscription… en commençant par des frais de gestion plus élevés.
Entre autres exemples, Remake Live applique des frais de gestion s’élevant à 18% contre 7 à 12% chez les SCPI “classiques”. Idem concernant les frais d’acquisition (3 à 9% pour les SCPI sans frais, 0 à 3% pour les SCPI classiques) et les frais de travaux (5 à 6% pour les SCPI sans frais, 0 à 3% pour les SCPI classiques).
Ces frais étant retenus sur les loyers perçus par la SCPI et avant le versement des dividendes, ils rognent encore davantage le rendement des associés.
Malgré cet impact sur les revenus distribués, force est de constater que le Taux de Distribution des SCPI sans frais n’a pas baissé. Au contraire, il est même supérieur au rendement moyen des SCPI "traditionnelles" (4,49% en 2021)… mais pour combien de temps ? Ces SCPI étant toutes récentes, leurs taux d’occupation physique et financier restent encore à 100%. Au fil des années surgiront des carences, des vacances locatives, des renégociations de baux… qui généreront un tassement naturel du taux de distribution, suite à une baisse du taux d’occupation financier et du taux d’occupation physique.
Les frais de souscription « remplacés » par des frais de retrait
Les SCPI sans frais de souscription ont également trouvé une parade pour prévenir les mouvements trop soutenus d’achat-revente : appliquer des frais de retrait. Tournant autour de 6%, ceux-ci correspondent à un pourcentage du prix de part, défini par le nombre d’années de détention des parts. La SCPI Iroko Zen, par exemple, applique 6% HT de commission de retrait avant 3 ans de possession des parts. Après 3 ans d’investissement, il n’y a plus aucun frais.
De son côté, la SCPI Remake Live applique 5% de commission de sortie pendant les 3 premières années de détention des parts. Pour une part de 200€, l’associé revend sa part et récupère 190€. Passé le délai des 3 ans de détention, aucun frais de retrait n’est encaissé et il regagne ses 200€, hors revalorisation de la part.
Un rendement plus avantageux ?
Avouons-le, en tant qu’investisseur, ce qui compte avant tout, c’est le rendement. Si les revenus perçus couvrent les frais demandés tout en apportant un certain bénéfice, pourquoi n’investirions-nous pas ?
On ne peut cependant nier qu’à l’heure actuelle, côté rendement, ces nouvelles SCPI sans frais explosent le compteur. Avec un Taux de Distribution naviguant entre 5% et 7%, elles dépassent largement la moyenne des SCPI “traditionnelles” (taux moyen : 4,45%).
Ceci s’explique notamment par leur présence très récente et un positionnement original. En modèle, Novaxia Neo, dont la stratégie d’investissement consiste à acquérir des biens immobiliers que la société modifie de façon réversible (transformation de bureaux en logements par exemple, et vice versa).
Une meilleure rentabilité en démembrement
Les SCPI sans frais trouvent également leur succès dans le cadre de certains montages, tel que le démembrement.
Si vous achetez des parts de SCPI en nue-propriété, selon la durée du démembrement, vous bénéficierez d’une décote sur la valeur des parts. Durant la détention des parts, seul l’usufruitier percevra les revenus. Une fois le démembrement arrivé à terme, le nu-propriétaire récupère la pleine propriété des parts. Alors soit :
- Il conserve les parts et continue de recevoir les revenus distribués,
- Il les vend et touche la valeur des parts, qui ne sera pas réduite des frais de souscriptions. Le retour sur investissement sera donc plus important que pour une SCPI “classique”.
Question fiscalité, le remembrement des parts n’entraîne ni impôts ni versements. Si le prix de la part SCPI n’a pas été revalorisé, vous ne serez pas imposé au régime des plus-values.
Des perspectives encore très incertaines
Les SCPI sans frais peuvent-elles néanmoins livrer, sur le long terme, un rendement équivalent aux autres SCPI ? Rien n’est moins sûr…
Les commissions de souscription n’existent pas par hasard : elles servent notamment à la société de gestion pour régler toutes les dépenses nécessaires à l’acquisition du patrimoine et la distribution des parts de la SCPI.
Par ailleurs, ces nouvelles SCPI se rémunérant davantage sur les frais de gestion et les frais annexes (travaux, cession/acquisition, etc), mais aussi via la création des frais de retrait, pourront-elles garder un rendement si attractif à long terme ? Rappelons qu’étant très récentes, les SCPI sans frais de souscription profitent d’un taux d’occupation particulièrement positif. Plus elles grandiront, plus elles auront besoin d’actifs et de capitaux pour investir, plus il leur faudra trouver dans les temps les actifs nécessaires. Sachant que les commissions de souscription servent justement à rechercher et acquérir ces actifs, le rendement des SCPI sans frais risque fortement d’être impacté sur la durée.
Le jour où leur rendement global se stabilisera à un niveau équivalent au rendement des SCPI “traditionnelles”, les SCPI sans frais pourraient alors perdre de leur intérêt.
Équilibre des marchés
Risque de crise de liquidité
Oui, la SCPI est un placement au long terme, et les investisseurs le prennent souvent comme un inconvénient : les frais de souscription leur imposent de conserver leurs parts suffisamment longtemps pour les amortir. C’est d’ailleurs la raison majeure de leur existence, la SCPI étant un investissement immobilier qui engage les gestionnaires sur plusieurs années.
Sans les frais de souscription, il serait facile d’envisager la SCPI comme un placement moyen/court terme, ce qui ouvrirait la voie à une demande de retrait massive. Cette demande de retrait provoquerait une crise de liquidité, contraignant la SCPI à revendre rapidement des actifs, bouleversant ainsi sa stabilité financière.
Équilibre du modèle économique
Les SCPI sans frais étant encore très jeunes, il faut attendre que leur taux d’occupation physique et financier se stabilise pour évaluer leur rentabilité.
De fait, ce nouveau modèle reste trouble et doit faire ses preuves sur la durée : il est trop tôt pour prévoir ce qu’un tel dispositif va donner au long terme. Sera-t-il sans risque pour les gérants et la liquidité du marché ? Permettra-t-il plus tard aux SCPI de racheter leurs parts à la revente ? Est-ce que les frais de retrait et des frais de gestion plus élevés pourront couvrir l’ensemble des dépenses investies par la société dans le développement de son parc immobilier ? À ces questions, seul le temps peut nous répondre.
Le modèle des SCPI avec frais, quant à lui, existe depuis 40 ans. Pratiqué maintes et maintes fois, il a une structure stable et transparente. Comme les personnes d’âge mûr, il a l’atout de l’expérience. Son succès constant, que même la pandémie n’a pas écrasé, démontre sa qualité et sa performance.
En résumé
Les SCPI sans frais de souscription ont certes l’avantage de ne faire payer aucune commission à la revente des parts, mais elles appliquent des frais annexes - notamment les frais de gestion - bien supérieurs à la moyenne. Ces frais, contrairement aux commissions de souscription, sont prélevés directement sur le rendement, avant redistribution des dividendes. Elles décomptent également des frais de retrait si leurs parts sont revendues avant 3 ou 5 ans.
À l’heure actuelle, ces SCPI étant très jeunes, ce schéma n’impacte pas encore leur taux de distribution, particulièrement élevé (autour de 7%).
Affaire à suivre...
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